Manywild : une artiste au grand talent (photos)

Chers lecteurs,

C’est au vernissage de Super(Wo)man, une exposition qui s’est récemment tenue à Chevilly-Larue (94), que j’ai découvert le talent de Manywild et que je l’ai rencontrée. Attirée par sa série de photographies intitulée Le nouveau Superman, très esthétique, j’ai voulu en savoir davantage sur l’artiste et vous la faire découvrir.

Manywild, 42 ans, a suivi des études d’Arts Plastiques à l’université de Paris VIII. Artiste aux talents multiples, elle s’est essayée à l’écriture de textes, aux BD photographiques (où la parole est donnée à des poupées), au chant et à la comédie. Elle a, par ailleurs, déjà organisé des expositions photos au Théâtre de Vanves et au Carpe Diem Café.

Manywild, c’est tout un univers, une personnalité complexe. Il se dégage de ses photos de la présence, du charisme, du contraste, parfois de la crudité. Mais aussi, une touche de mystère, d’insaisissable. Vous en saurez davantage sur elle en découvrant ses photos et en lisant notre entretien qu’elle a très sympathiquement accepté :

Pourquoi montrer Superman exécutant des tâches ménagères ?

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J’ai choisi d’abord une représentation masculine pour exécuter ces tâches ménagères, en décalage avec notre inconscient collectif qui y voit davantage des représentations féminines. J’ai voulu montrer par là ce qu’est vraiment un super héros du quotidien. Exécuter ces tâches quotidiennement est très ennuyeux, rébarbatif, alors on peut considérer comme héroïque quiconque les accompli, que ce soit un homme ou une femme. J’ai simplement trouvé ça plus pertinent d’y mettre un Superman plutôt qu’une WonderWoman, pour casser le cliché le plus vieux de l’histoire de l’humanité. Mais, dans cette série, on voit aussi Superman pleurer à la fin d’un film : c’est là encore pour s’extirper des clivages des genres et montrer qu’un homme aussi peut exprimer ses émotions tout en restant un Superman, que ça n’est pas un état de faiblesse. « No gender, no role ».

Qu’est-ce qui inspire vos créations ?

Mes inspirations viennent du quotidien, mais aussi de mon expérience et de mon histoire personnelles qui rejoignent malgré leur singularité, un certain universel. Mon univers et mon travail s’ancrent dans la vie adulte comme une enfance qui perdurerait, utilisant l’expérience pour s’en jouer, non pervertie par elle. Je scénographie beaucoup mes photographies, ce qui me permet de créer des mondes parallèles nourris de fantasmes et de rêves édulcorés où l’innocence vient embrasser une réalité crue, développant une esthétique qui nous ramène à une quête de perfectibilité déchue – comme une Barbie qui se jetterait du quinzième étage, torturée par une réalité trop froide. Mon leitmotiv est d’entériner un état de conscience laissé pour compte lors de l’évolution, en faisant renaître un affect pur, motivé par un sentiment profond d’abandon, la perte d’une époque où tout est possible et par le caractère définitif de la mort. Comme une béquille pour supporter le monde et y trouver des échos.

J’aime beaucoup My All Star Dancer, pouvez-vous en dire quelques mots ?

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Pour My All Star Dancer, je joue une nouvelle fois sur le décalage. Je déplace une danseuse classique habituée aux opéras, dans un univers urbain nourri street art. Elle devient un mix d’étoile et de basketteuse. Mon modèle et amie Claire Buffet a été danseuse classique pendant 15 ans sous la direction de la célèbre professeure Rosella Hightower ; elle y a appris la rigueur et un amour immense pour cette discipline. Mais, comme Josephine Baker, Claire a deux amours : la danse classique et… le basket ! Deux univers réunis ici, dans cette série ; la grâce alliée à la puissance. Ces deux univers font partie de Claire. Elle est ma super héroïne.

Quelques mots aussi sur la série SuperHéros, également très réussie ? IMG_3758.jpeg

Pour SuperHéros, l’idée est née de deux grands coups de coeur et d’une rencontre. J’avais travaillé quelques semaines plus tôt sur un défilé de prêt-à-porter de mon ami Franck Dell, styliste chez Yperlab (Instagram : Yperlab), en tant qu’habilleuse. J’adore ses créations (qui m’ont d’ailleurs servi pour cette série), elles sont à la fois décontractées et très classieuses, et j’ai adoré travailler avec ces modèles amateurs. J’en ai trouvé 3 particulièrement très beaux, incarnant une certaine dignité. Ils ne savaient pas encore qu’ils allaient devenir mes SuperHéros. Je suis aussi tombée amoureuse de ce lieu que j’ai choisi pour les photographier : une ancienne gare de la petite ceinture, en réhabilitation en un lieu pluriculturel par le propriétaire de La Bellevilloise (20ème) dans le 14ème arrondissement, mais encore en travaux. Ce nouveau lieu qui ouvrira ses portes en 2019 s’appellera Le Poinçon Paris, et je les remercie encore d’avoir soutenu mon projet. J’avais donc mes SuperHéros que je placerais dans ce lieu brut, encore en friche, mais majestueux, à la hauteur de mes modèles. Cette série suggère l’action : qu’est-il en train de se jouer? Que s’est-il passé avant la photo et que va t-il se passer après? Mes personnages sont dignes et combattants, on sent leur détermination et leur puissance. Ce sont de simples humains et pourtant on les imagine dotés de super pouvoirs. Toujours dans ma démarche de rééquilibrer les rôles, j’ai fait de leur leader une femme.

Certaines photos peuvent choquer comme dans Le Rose Surfait, Porniture… qu’est-ce qui a motivé ces clichés ?

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Le Rose Surfait

Le Rose Surfait est une série que j’ai faite quand j’étais plus jeune. Je commençais à m’intéresser à la couche parfaite de vernis que l’on gratte pour découvrir la vraie facette des choses. Le rose étant lié au réconfort, au côté girly des jeunes filles, j’ai voulu gratter son vernis pour voir ce qui se cachait vraiment en dessous. Encore ce décalage, entre une couleur que l’on croit connaître et que l’on prend à la légère, et la crudité et le désenchantement fort des scènes photographiées. On pense que mettre un peu de rose par-ci enjolive les scènes de la vie. Je montre que non, et que le désenchantement aussi peut être rose.

Pour la série Porniture, je me suis intéressée au corps et à la nourriture. On est ce que l’on mange, dit-on, et j’ai voulu montrer à nu ce rapport entre les deux, ce curieux mélange. L’Homme a besoin de nourriture pour survivre, elle devient une extension de lui-même. Il est tantôt cannibale, et tantôt elle se joue de lui. Dans tous les cas, l’Homme dépend d’elle. Je n’ai pas de problème avec la nudité et je suis avide de danse contemporaine. C’était donc naturel de chorégraphier ces corps et de les figer ensuite comme des bonbons dans la vitrine d’un confiseur.

 

Sur quel projet travaillez-vous actuellement ?

Actuellement, je travaille sur un projet photo qui illustre la féminité affublée d’un phallus, ou comment le féminin et le masculin peuvent cohabiter à la fois métaphoriquement et dans un même corps ; je vous invite à suivre cette série très prochainement sur mon site manywild.com. Il y a toujours une pointe d’humour dans mon travail, même si parfois il est plus grinçant que d’autres. Mais je travaille surtout à « Art Pocket », la foire d’art abordable que j’ai créée il y a 4 ans avec mon association Many Arts. Je m’occupe de sélectionner des artistes de talents qui font des mini séries financièrement accessibles, spécialement pour la foire. Il y en a pour toutes les bourses et les oeuvres les plus « chères » sont à 500€. De quoi se rincer l’oeil et pouvoir acquérir enfin une véritable oeuvre d’art. L’autre particularité de cette foire c’est la présence pendant les 3 jours des artistes, qui sont là pour rencontrer le public. Je vous invite donc tous à venir découvrir cette quatrième édition riche en évènements et en échanges, qui démarre le 30 novembre prochain !

Art Pocket imageArt Pocket  

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